assomption 2022
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Assomption 2022
« La mort étant venue par un homme, c’est par un homme aussi que vient la résurrection… dit saint Paul. « C’est dans le Christ que tous recevront la vie » ajoute-t-il. Il souligne aussi la puissance du Ressuscité sur tout être vivant et toutes les puissances invisibles : êtres célestes, toute Principauté, toute souveraineté et Puissance. Le Ressuscité est le roi de l’univers. « Et le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort, car il a tout mis sous ses pieds ». Or nous sommes tous sous le régime de la mort : d’où viendra notre espérance ? comment accéder à la vie éternelle et comment serons-nous ?
A partir de la résurrection de Jésus, de son Ascension et de sa glorification, Paul nous remet devant les yeux la portée immense du salut pour les êtres vivants et l’univers entier. Le salut concerne les petits et les grands, les hommes et les femmes de tout temps depuis l’origine du monde. Le salut touche l’unité personnelle de tout être vivant, corps et âme. La gloire de Dieu et sa puissance peuvent aussi apparaître au ciel et sur la terre. Aussi ne faut-il pas s’étonner aujourd’hui de découvrir que ce salut prenne des dimensions à la fois cosmiques et relationnelles en Marie magnifiée au ciel.
Oui, la femme de l’Apocalypse peut signifier l’histoire de Marie engagée dans les combats pour le salut du monde et au nom de sa maternité. Elle est dans les douleurs et les joies de l’enfantement. Cette femme a « le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles ». Elle est mère d’un enfant appelé à être le berger de toutes les nations. La conclusion du combat est exprimée d’une voix forte : « maintenant voici le salut, la puissance et le règne de notre Dieu, voici le pouvoir de son Christ ». La maternité de Marie est un signe du salut : elle nous donne l’assurance que la vie humaine a sa source en Dieu et que nous sommes faits pour la vie divine, en Dieu, la vie éternelle. La mort n’aura pas le dernier mot en notre corps et en notre âme.
En affirmant que Marie est montée au ciel sans connaître la corruption de la mort, nous sommes plongés non pas dans un miracle, ni dans une manœuvre magique, mais dans l’assurance que Dieu sauve tout ce qu’il a assumé de la réalité humaine. Il a voulu naître d’une femme et connaître de manière intime et personnelle cette condition humaine. Ressuscité, il nous a montré la beauté de l’union en lui du corps et de l’esprit. Son désir est de manifester cette harmonie de la nouvelle création en Lui. Celle qui l’a porté en son sein et l’a accompagné dans toute sa mission est la première sur le chemin de la foi, de l’espérance et de la charité. Marie est femme et aujourd’hui encore, c’est sa maternité qui est la clé d’interprétation du mystère de l’Assomption. La mère du sauveur est appelée à suivre son chemin par grâce : être glorifiée près de lui et resplendir en son corps maternel. Celle qui est la théotokos ne peut pas rester sous la terre : elle est élevée dans la lumière éternelle pour que sa maternité soit honorée et prenne toute sa dimension dans le temps et dans l’espace. Marie est glorifiée en son corps pour rester la mère de tous. La maternité, même au ciel, ne peut pas se concevoir sans un corps personnel.
Cette femme en gloire est la jeune fille qui a visité joyeusement sa cousine Elisabeth. Et cette rencontre est pleine d’un feu prophétique : d’abord dans le cri d’action de grâce d’Elisabeth, inspiré par la gestuelle de Jean-Baptiste en son sein. « Tu es bénie entre toutes les femmes et le fruit de tes entrailles est béni. Comment m’est-il donné que la mère de mon sauveur vienne jusqu’à moi ? » Et ensuite Marie entre dans une allégresse qui dépasse ses sentiments, qui rassemble les promesses exprimées par les prophètes, qui dit prophétiquement ce que nous vivons avec elle dans l’Eglise depuis des siècles : « désormais tous les âges me diront bienheureuse ». Marie est la preuve vivante d’une attention particulière à chacun des enfants qui lui sont confiés et d’une présence de Dieu à tout ce qui est humain. Marie est la preuve vivante de ce que nous pouvons devenir un jour parmi les saintes et saints de Dieu. Marie nous dit la grandeur, l’unité et la singularité de tout être humain. Notre corps n’est pas fait pour mourir et disparaître dans le temps et dans l’espace, mais pour resplendir d’une vie nouvelle. Marie par grâce est élevée, corps et âme, dans la gloire du ciel. Cette assomption est l’assurance pour nous de pouvoir vivre, si Dieu le veut, une transformation de notre personne et une unification de la chair, du corps, de l’âme et de l’esprit. Nous sommes « un », créé et sauvé par le Christ assis à la droite du Père.
Dans la visitation, nous pressentons l’harmonie en ces femmes enceintes du charnel et de l’Esprit. L’Esprit inspire les deux femmes et les deux enfants. L’Esprit, même caché dans la chair, est bien présent et agissant : il atteste l’action de Dieu dans l’histoire. Ce qui est simple, modeste, fraternel, prophétique en Marie et Elisabeth s’accomplit aujourd’hui dans l’Assomption de Marie. Tout en elle est préservé, sanctifié, glorifié. Marie au ciel, est pleine de lumière et se reconnaît dans sa maternité qui de Jésus, s’adresse et repose sur chacun de nous et sur nous. La gloire de Marie, c’est de pouvoir prendre soin de chacun de nous : sa maternité nous enveloppe, veille sur nos vies et nous assure de la vie éternelle qui nous est promise. Cette gloire, nous la fêtons avec joie comme des enfants d’une même mère qui nous connaît intimement.
A. Mattheeuws, jésuite