Homélie 7 juin 2025. Ac 28,16-31 ; Ps 10,4-7 ; Jn 21,20-25
On parle souvent de Paul comme l’apôtre des païens et il est vrai que son témoignage a traversé les frontières entre les juifs et les goyim. Mais la lecture d’aujourd’hui, dans cette montée de Paul vers Rome, nous indique aussi la croix plantée dans son cœur. A son arrivée il convoque ses frères religieux et dit : « Frères, moi qui n’ai rien contre notre peuple et les coutumes reçues de nos pères, je suis prisonnier depuis Jérusalem » … et prisonnier de l’envahisseur romain. Dans ses voyages de fondations, Paul s’adresse toujours à ses frères juifs pour annoncer que le Christ est bien le Messie et qu’il accomplit toutes les promesses d’Israël. Le mystère du refus en Israël est une souffrance et une incompréhension pour lui. Il ne s’y résout pas. Ce n’est pas par déception qu’il évangélise les païens, mais c’est comme pharisien, et juif croyant aux promesses du Seigneur. Il est témoin de l’identité de Jésus Christ, là où il est : même dans les chaînes. Et ses nombreux écrits portent la marque de ses désirs et de ses souffrances. Cependant, malgré ces épreuves, il garde son assurance et témoigne ainsi dans la douleur.
Avec Paul, la figure de Pierre est incontournable ; nous allons les fêter ensemble à la fin du mois de juin. Dans l’Evangile, Jésus resserre le lien immédiat entre Pierre et lui. Il le ramène à sa vocation à l’amour et lui disait hier : « Pierre, m’aimes-tu plus que ceux-là ». C’est l’amour qui importe et la mission des uns et des autres, même différente, s’enracine dans cette immédiateté relationnelle. Que t’importe ce qui arrivera ou ce que feront les autres, dit-il à Pierre. « Toi, viens et suis-moi ». Se centrer sur l’essentiel, pour nous aussi, cela revient à faire uniquement ce que Dieu nous demande : ni plus ni moins. La richesse de son appel pour chacun d’entre nous n’entre pas dans une dialectique de comparaison. Chacun est appelé à l’amour : cet amour fait l’histoire différente de chacun.
Nous sommes déjà à la fin de l’Evangile de saint Jean. Et cette manière de conclure est à la fois amusante et ouverte : « Il y a encore beaucoup d’autres choses que Jésus a faites, et s’il fallait écrire chacune d’elles, je pense que le monde entier ne suffirait pas pour contenir les livres que l’on écrirait ». Tout n’est pas dans les livres ou dans l’Evangile. Le christianisme n’est pas d’abord une religion du Livre. Il y a un surcroît, un surplus dans chacune de nos histoires et dans l’Eglise. Désormais, il nous faut lire aussi la vie avec les dons et le discernement du Saint Esprit. C’est pourquoi nous l’invoquons particulièrement pour qu’il continue à nous inspirer dans sa Pentecôte.
